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Fernanda ROY-CAMILLE : une Créole au service des autres

Fernanda ROY-CAMILLE

Disparue en 2004 à l’âge de cent ans, Fernanda ROY-CAMILLE vient d’être honorée par la municipalité de Schoelcher (Martinique), qui a donné son nom au rond-point situé près de Madiana.

Cette Créole martiniquaise aura fortement marqué la vie de son île par les multiples actions sociales qu’elle a conduites en faveur des défavorisés. 
Nous avons plaisir à retracer ici les grandes lignes de sa riche vie.
Née Fernanda SAINT-OLYMPE le 3 juin 1904 à Saint-Joseph, cinquième d’une fratrie de 9 enfants, elle connaît une jeunesse heureuse entre une mère qui lui donne une sensibilité émouvante et un père qui lui apprend droiture et simplicité. Enseignante en sciences naturelles, elle épouse en 1927 Ludovic ROY-CAMILLE , commerçant à Fort-de-France, qui l’accompagnera pendant près de 70 ans ! Malheureusement, aucun enfant ne naîtra de leur union.
Toute sa longue vie, Fernanda ROY-CAMILLE fera montre d’un dévouement sans limites. En commençant par le Comité Départemental de la Croix-Rouge, où, répondant en 1930 aux sollicitations de Madame Victor SÉVÈRE, alors épouse du député maire de Fort-de-France qui l’invite à l’aider à gérer cet organisme, elle y sera pendant 30 ans une trésorière dévouée et efficace qui donne son temps et… son argent.
Puis ses implications deviennent innombrables au service des malades et des déshérités : en passant par les lépreux (le Docteur MONTESTRUC, à l’époque Directeur de l’Institut Pasteur et du Pavillon Calmette, lui demande un « petit coup de main pour les lépreux » qui durera des années) et les tuberculeux (dont elle s’occupera durant 8 ans. Elle organise ensuite les « Vestiaire des pauvres » dont elle devient la présidente jusqu’à la disparition de l’oeuvre.
La première crèche pour ouvrières agricoles, c’était aussi l’oeuvre de Fernanda ROY-CAMILLE : avec son amie Rose YANG-TING, elle monte au Morne Rouge la première crèche de la Martinique. Elle se plaisait à dire à ce propos : « Nous faisions cela pour permettre aux ouvrières agricoles de mettre leurs enfants en lieu sûr, sous la surveillance d’une dame. Cette dame, elles la payaient de leur poche, chacune donnait quelque chose. »
Elle donnera libre cours à son amour des enfants qu’elle n’a pas eus : au Comité de la sauvegarde de l’Enfance, créé et géré avec une autre des amies Lucie MATILLON, et dont elle s’occupe des finances. Mais son oeuvre préférée, celle de la tendresse, c’est le Foyer des orphelins, aujourd’hui LA RUCHE. Avec ses amies, elle remue ciel et terre pour que « ses petites filles » aient un toit, mais aussi reçoivent l’instruction qui leur permettra de gagner leur vie.
Enfin, Fernanda ROY-CAMILLE était aussi une artiste : en plus de toutes ces qualités relevant du social, elle a affiché des prédispositions artistiques tant dans la couture, dans la peinture que dans l’artisanat d’art, en réalisant de nombreux tableaux ; avec l’une de ses soeurs, Léonce, elle excellait dans la peinture à l’aiguille.
L’oeuvre déterminante de sa vie sera la création à Fort-de-France en 1965 du premier Club Soroptimist de l’Outremer français. Créer un club de femmes dans le but avoué d’être actrices de progrès dans leur pays est une idée prometteuse. Une quinzaine de membres en seront les fondatrices, parmi lesquelles des amies proches de Fernanda : Thérèse THEANOR, Emma MONPLAISIR, Yolande TOUIN, Rose-Marie ROY-MESHUIT, Lucy NARDAL, etc. Quatre bougies jaunes et bleues matérialisent l’appartenance du nouveau club à l’Union internationale, la Fédération européenne, l’Union française, la quatrième représentant le nouveau club. La lueur des flammes allumées ce jour là ne s’éteindra jamais. Aucun champ d’action ne sera étranger au bon vouloir des Soroptimistes. La création de ce premier club Soroptimist ultramarin marquera une étape importante dans la vie associative féminine en Outremer, puisque suivront de nombreux autres clubs : d’abord en Guadeloupe en 1969, puis en Guyane en 1976, Tahiti en 1980, Nouméa en 1983, la Réunion en 1985 et Mayotte en 1990.

Dès 1966, Fernanda ROY-CAMILLE crée, avec audace, l’association pour l’aide aux Personnes handicapées (l’AAPH), première institution spécialisée des DFA, pour enfants handicapés mentaux. L’IMP (Institut Medico-pédagogique) « Les Fougères », le premier de la Martinique, fut inauguré en Décembre 1968. Il accueille à l’ouverture des enfants de 6 à 14 ans des deux sexes suivant le régime de semi-internat ; en 1970 la capacité des Fougères est portée à 40 places.

Mme. GISCARD d’ESTAING en visite aux Fougères

Sous les présidences successives de ses amies Paulette PIGEON et Emma MONPLAISIR, notamment, le Club Soroptimiste de Fort-de-France poursuivra l’oeuvre commencée et mènera à terme d’autres opérations d’envergure : extension des Fougères, dont le financement sera assuré comme d’habitude par de multiples manifestations (journées festives, dîners dansants, souscriptions auprès des membres et amis) ; en 1973 le Club organise au Parc Galliéni les premières Floralies internationales de la Martinique en faveur de l’extension des Fougères. Quelques années plus tard c’est la création du premier Centre d’action par le travail (CAT) de Bellefontaine, qui reçoit des adultes handicapés.

Ainsi, toute sa vie, Fernanda ROY-CAMILLE aura été une pionnière, dans tous les domaines où son altruisme pouvait s’exprimer. De son vivant, son oeuvre a été reconnue et récompensée par de nombreuses décorations. Elle a, en effet, reçu les insignes de Chevalier de la Légion d’honneur, de Chevalier du Mérite National, d’Officier des Palmes Académiques ainsi que la Médaille de la Croix Rouge.

Le 3 juillet 2012 le maire de Schoelcher, Luc-Louison CLÉMENTÉ, a dévoilé la plaque apposée sur le rond-point de Madiana Plage, qui porte dorénavant le nom de Place Fernanda ROY-CAMILLE, en présence de personnalités, des familles SAINT-OLYMPE et ROY-CAMILLE, des Soroptimistes des quatre clubs de la Martinique et des personnels des structures de l’AAPH.

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