Ma créolité : l’ouverture, une ardente obligation
Par Marie-Reine de Jaham, écrivain, Présidente-fondatrice du Cercle Méditerranée Caraïbe, Chevalier des Arts et des Lettres.
Ouverture et créolité : quel rapport ? A priori, aucun.
Le dictionnaire de la langue française propose pour ouverture : action d’ouvrir, fente, trou, commencement, proposition…. Le Dictionnaire de Furetière, en 1690, donne, pour créole : nom que les Espagnols donnent à leurs enfants nés aux Indes, puis, par extension, Européen né aux Indes, c’est-à-dire né dans la zone américano-caraïbe.
Mais les mots, tout comme les humains, ont une vie. Ils évoluent, s’adaptent, changent au fil du temps. C’est ainsi qu’aujourd’hui, ouverture a intégré le domaine politique et socio-culturel pour désigner un état d’esprit réceptif aux idées d’autrui. Et créole recouvre, non plus une petite catégorie de Blancs, mais une vaste diaspora de 20 millions d’individus, de toutes les nuances de peau, de toutes les nationalités, ayant en commun une origine : la colonisation, et une langue : le créole. Vues sous cet angle, ouverture et créolité se rejoignent. Et même, la créolité, fruit d’un brassage culturel et ethnique sans équivalent, pourrait mieux que tout autre symboliser l’ouverture.
Qu’entend-t-on au juste par ouverture ?
Si l’on approfondit le concept, l’on découvre, derrière l’expression banalisée, une authentique mutation sociétale et culturelle, au centre de laquelle se trouve le rapport individuel avec l’Autre.
Un rapport individuel multiplié à l’infini. C’est ce qui fait sa force et aussi son danger.
Une mutation ?
Pour Claude Levi-Strauss, mort en 2009 à l’âge de cent ans, le fait dominant de notre temps est la croissance démographique : « Quand je suis né, il y avait 1 milliard d’individus sur la planète. Quand je suis entré dans la vie active, 2 milliards. Aujourd’hui, ils sont plus de 6. Ils seront 9 milliards en 2050 ».
Chiffres implacables, qui montrent que la notion d’ouverture ne peut aujourd’hui être sérieusement abordée si ce n’est au niveau planétaire.
L’humanité a connu des crises graves et s’en est toujours tirée. Rien de nouveau sous le soleil ? Faux. La nouveauté : ces 9 milliards d’êtres, avec leurs corollaires que l’on commence à percevoir -éclatement des structures, accélération et irréversibilité des ravages. Nous prenons conscience que la planète n’est pas extensible et qu’il va falloir la partager. Une mutation timide s’amorce dans les esprits.
C’est alors que se dresse, mystérieux, terrifiant, l’Autre.
Qui est l’Autre ?
L’Autre, c’est celui qui est différent de nous.
L’homme étant égocentrique par essence, l’antagonisme s’observe à tous les âges et à tous les échelons, de la famille à la nation, en passant par l’école, la corporation, la cité, l’appartenance politique.
Et l’Autre est d’emblée un rival. L’Autre appartient à une tribu, une caste, une classe, une religion, une nation, une race autres que les nôtres. Son existence nous apparaît comme une menace. Il serait bien capable, oui, monsieur ! de venir « prendre notre place », « manger notre pain », « violer nos femmes » ! Aussi s’efforce-t-on de le contenir dans d’étroites limites.
Jusqu’au début du XXème siècle, cela ne fut guère difficile. L’Autre n’était pas nombreux, il pouvait être conquis, décimé, asservi, opprimé, méprisé. Les premières colonisations remontent à la plus haute antiquité. L’esclavage a été pratiqué dans tous les pays, par toutes les civilisations.
« L’homme est un loup pour l’homme ». L’aphorisme de Thomas Hobbs est passé dans le langage populaire. L’inégalité et l’exploitation n’ont cessé de régner sur la planète, au bénéfice d’une minorité. Ainsi se déroulait, ainsi se déroule encore, le jeu du pouvoir, entre partenaires avertis, sinon consentants.
Mais demain, sous l’écrasante pression de milliards d’individus ?
Une longue quête?
Il s’est toujours trouvé des précurseurs de l’ouverture, philosophes, visionnaires ou saints, prônant le respect de la dignité humaine, la justice, l’harmonie, la pratique du bien et le droit au bonheur pour tous.
« Aimez-vous les uns les autres », commande Jésus.
De façon étonnamment moderne, Aristote écrit: « La science la plus élevée est celle qui connaît en quelle fin il faut faire quelque chose, et cette fin est le bien de chaque être. D’une manière générale, c’est le souverain bien et le respect de la planète ». Epicure déclare, dans une envolée assez peu conforme à l’image qu’on se fait de « l’épicurien » : « La sagesse est le plus grand bien. Elle nous enseigne qu’on ne peut pas être heureux sans être sage, honnête et juste, ni être sage, honnête et juste sans être heureux ».
Sur cette lancée philosophique et moralisatrice, les penseurs du XVIIIème siècle tentèrent de jeter les bases d’une société nouvelle, plus juste et plus heureuse.
Voltaire mit ses espoirs dans les Lumières : « Ce monde n’est qu’un chaos d’absurdités et d’horreurs, la philosophie seule peut lui conférer un peu d’humanité ». Rousseau préconisa le partage : « Le premier qui, ayant enclos un terrain, s’avisa de dire : ceci est à moi, et trouva des gens assez simples pour le croire, fut le vrai fondateur de la société civile ». (C’était trop pour Voltaire qui écrivit en marge de son exemplaire : « Voilà la philosophie d’un gueux qui voudrait que les riches fussent volés par les pauvres »). Fichte fustigea le pouvoir : « Non, prince, tu n’es pas notre Dieu. De lui nous attendons le bonheur ; de toi, la protection de nos droits. Tu ne dois pas être bon envers nous, tu dois être juste ».
Juste, le mot est lâché.
L’Europe du XVIIIème siècle résonne des revendications d’équité qui transformeront le Nouveau Monde en attendant d’essaimer la planète.
De cette tige nourrie de sève philosophique naquirent le credo de la République française, liberté, égalité, fraternité, et la Déclaration d’Indépendance des Etats-Unis d’Amérique : « Nous tenons pour évidentes les vérités suivantes : tous les hommes sont créés égaux… ils sont doués par le Créateur de certains droits inaliénables… la vie, la liberté et la recherche du bonheur ». En 1948, les Nations Unies reprirent ces idées dans la Déclaration Universelle des Droits de l’Homme.
Un rêve impossible ?
Comment assurer concrètement leur application ?
L’époque moderne a cru résoudre le problème en figeant dans la loi les principes humanitaires. Prises d’un zèle vertueux, les démocraties se sont mises à légiférer, empilant décret sur décret. Pour quels résultats ?
Des progrès ont été accomplis. Le travail des enfants a été prohibé, l’esclavage aboli, la ségrégation interdite. Les femmes ont obtenu le droit de vote. On a pondu des lois pour pénaliser le racisme, interdire la discrimination, favoriser le développement des nations les plus pauvres, instaurer des droits nouveaux : droits des minorités, droit de l’enfant, droit à la différence, droit à l’éducation, au logement, au travail, au revenu minimum, à l’égalité des chances…
Et cependant… Des glapissements de singe résonnent encore dans les stades lorsqu’un footballeur Noir marque un but ; des quartiers vivent dans la terreur des affrontements entre jeunes des cités et représentants de la République. Dans la France de 2009, le racisme persiste, comme la discrimination, le travail clandestin et l’immigration chaotique, avec la violence pour corollaire.
A l’échelon mondial, les maux n’ont pas été mieux enrayés : ni le travail des enfants, ni l’esclavage, ni la ségrégation, ni la misère, ni le terrorisme, ni les haines fratricides.
L’ouverture à l’Autre n’est-elle qu’un rêve impossible ?
Un apprentissage nécessaire ?
Ou alors… y aurait-il un chemin que nous n’avons pas su trouver ?
Existe-t-il un sésame, un talisman qui permettrait de comprendre l’Autre et de l’aimer ?
Car pour aimer, il faut connaître, il faut comprendre. Celui qui n’a jamais entendu Bach ne peut apprécier sa musique. L’aveugle ne saisit pas les nuances d’un tableau.
L’apprentissage de l’Autre est la voie de nombreux ethnologues parmi lesquels se distingue la figure de Claude Levi-Strauss. Pour lui, l’égalité biologique des races est une réalité. Les mécanismes qui régissent les sociétés sont essentiellement les mêmes. Tous les hommes possèdent un langage, des techniques, des croyances religieuses, une organisation politique et sociale, mais « le dosage n’est jamais exactement le même. L’important, c’est la façon dont chaque culture les regroupe, les retient, les exclut, les utilise… sa façon particulière de résoudre les problèmes, de mettre en perspective des valeurs. »
Chaque société a ses spécificités, ses faiblesses et ses points forts.
Ainsi, les Indiens et les Asiatiques ont devancé l’Occident pour la connaissance et le contrôle du corps humain : yoga, techniques du souffle ou arts martiaux… Les Mayas n’utilisaient pas la roue, mais connaissaient le zéro, base de l’arithmétique, un demi-millénaire avant sa découverte par les savants indiens, qui le transmirent aux Arabes. Dans l’Afrique ancienne, les systèmes sociaux, politiques et philosophiques, les arts, la musique témoignent d’un passé extraordinairement fertile… Quant aux peuplades dites primitives, comme les Eskimos ou les Aborigènes, elles ont développé des facultés d’adaptation prodigieuses et des procédés uniques au monde.
Une fertilisation croisée ?
Ces différences, lorsqu’elles sont comprises et exploitées, sont source d’échanges féconds. L’Histoire en apporte la preuve. « Or, écrit Lévi-Strauss, la diversité est rarement apparue aux hommes pour ce qu’elle est : un phénomène naturel. Ils y ont vu une sorte de monstruosité ou de scandale… L’attitude est alors de répudier purement et simplement les formes culturelles, morales, religieuses, sociales, esthétiques, les plus éloignées de celles auxquelles nous nous identifions. « Habitudes de sauvages », « Ce n’est pas de chez nous », réactions premières qui traduisent ce même frisson, cette même répulsion en présence de manières de vivre ou de penser qui nous sont étrangères… »
Malgré le travail d’information accompli de nos jours, cette méfiance instinctive n’a pas disparu. Jamais autant de livres, films, reportages, documentaires, conférences et débats télévisés n’ont été consacrés à la découverte de l’Autre, et pourtant, la notion d’égalité continue à dérouter l’esprit. C’est qu’aussitôt surgit une interrogation : comment expliquer le retard apparent, le « sous-développement » de certaines sociétés ?
Le progrès n’est pas linéaire. Il avance par bonds capricieux. Dès l’origine, les sociétés ont utilisé diversement leur temps. Certaines ont su accumuler trouvailles et inventions afin de construire une civilisation, d’autres, pour des raisons mystérieuses, n’ont pas montré ce don de synthèse et sont demeurées stationnaires.
Comment l’expliquer?
C’est le casse-tête sur lequel achoppe notre bon sens.
Les conceptions antiques assimilèrent l’humanité à un être vivant passant par des stades successifs, de l’enfance à la maturité. La variété des cultures ne ferait qu’illustrer des moments de ce processus. Ces idées reprises par un certain nombre de penseurs contemporains, ne fournissent pas d’éclaircissement satisfaisant. Elles visent à supprimer la diversité culturelle, tout en feignant de la reconnaître, et reviennent à traiter les différents états des sociétés humaines comme de simples étapes d’un développement inexorable, convergeant toutes vers un même et unique but : l’accession au modèle occidental.
Un autre référentiel ?
Le modèle occidental est le produit d’une civilisation entièrement orientée vers la mise en œuvre de moyens sophistiqués, tendus vers un idéal de prospérité que mesure le revenu par habitant : ce qu’on nomme « progrès ». Les civilisations ne répondant pas à cet idéal sont qualifiées de sous-développées. Si le critère retenu avait été différent, par exemple la spiritualité, la générosité ou la survie en milieu hostile, ne serait-ce pas plutôt l’Occident qui ferait figure de sous-développé ? Lorsqu’on observe l’impasse écologique et humaine où s’engage la société de consommation, l’on peut s’interroger sur la valeur intrinsèque du modèle occidental.
Pourrait-on imaginer un référentiel différent ?
Les grands repères censés nous unir, la Justice, le Bien, le Beau, le Vrai, suscitent malheureusement les plus sanglantes querelles. Partout sur le globe, des groupes se font la guerre au nom d’une appartenance à un sol, à une ethnie ou à une confession religieuse. Désemparé, l’homme se cherche de nouveaux leaders et de nouvelles valeurs.
C’est peut-être pourquoi l’arrivée de Barak Obama sur la scène internationale a bouleversé le monde.
L’avènement de ce métis de père africain à la tête de la première puissance du globe représentait une expérience unique, un événement prodigieux qui faisait croire à la possibilité de miracles. Comme la créolité est le symbole de l’ouverture, Obama était l’incarnation de la fraternité. Sa façon de nous parler nous a émus jusqu’au tréfonds. Des mots qu’on n’osait plus prononcer, des mots comme foi, espérance et charité, ont cessé du jour au lendemain de faire ricaner. Ce fut une brise d’air pur. Mais après une année de présidence, que reste-t-il de l’exaltante promesse, « Yes, we can » ?
« Obama walks a long and lonely road« , observe le Financial Times. Celui qui fut un héros populaire intouchable a cessé d’irradier la lumière du changement et apparaît coupé de l’opinion. Ses nécessaires réformes se heurtent aux intérêts égoïstes et ses visions généreuses, aux cynismes politiques.
Nous tous qui avons espéré retenons notre souffle. Barak Obama est devenu notre champion.
Il faut qu’il réussisse, nous le voulons de toutes nos forces.
Car nous réalisons confusément qu’il s’agit du combat pour le Beau, le Vrai, le Bien. Et que ce combat-là nous ne pouvons pas le perdre. Non.
Une ardente obligation ?
Cette ardente obligation, je crois l’avoir pressentie dès l’enfance. Je n’étais encore qu’une toute petite fille, dans la Martinique des années cinquante. L’île n’était pas très développée. Pour aller voir mes grands-parents, planteurs de canne à sucre, on prenait une route sinueuse, la trace, qui serpentait à travers une jungle luxuriante. Il fallait deux heures pour faire les cinquante kilomètres et l’on croisait rarement une voiture. Parfois, je voyais surgir des femmes en haillons portant sur leurs têtes d’énormes paniers, des enfants pieds nus ployant sous des fagots d’herbes, et qui devaient avoir mon âge. J’apercevais des cases en planches de caisses, recouvertes de tôles rouillées, avec le chaudron posé dehors, à terre, pour cuire le manger, et le cochon-planche attaché à un manguier.
Tant de misère m’impressionnait. Une chose m’intriguait. Tous ces gens étaient noirs… Pourquoi cela n’arrivait-il qu’aux Noirs ? Je devinais que la question était délicate. Je n’osais la poser. Je finis par interroger ma Da. Le sourire habituel disparut d’un coup du visage de ma vieille Nounou. « C’est parce qu’on a été esclaves, marmonna-t-elle enfin. « Ca veut dire quoi, esclaves ?« Esclaves, c’est être moins que rien. « Mais pourquoi ? Comment c’est arrivé ?‘Après une hésitation, elle lâcha en créole : « On ne naît pas esclave comme on naît petit poisson. »
C’était donc mérité ? C’est cela que voulait dire Da ? Je n’oublierai jamais son intonation, amère, résignée, mais ce qui m’horrifia, ce fut la conviction que j’y percevais, la conviction de sa propre infériorité. Je sentais, sans pouvoir l’exprimer, que la pire chose qu’on puisse faire à un être humain, c’était de l’amener à se mépriser lui-même. Mon petit cerveau de six ans entra en ébullition. Certaines personnes méritaient donc d’être esclaves tandis que d’autres méritaient de vivre dans de belles maisons ? Il y aurait toujours des gens qui feraient la trace en voiture et des gens en guenilles qui les regarderaient passer, parce que c’était mérité ? Mérité ? Qui pouvait en juger ? Qui avait ce droit-là ?
Adulte, la question m’a poursuivie.
Je regardais autour de moi. La Martinique était bigarrée, les peaux reflétaient l’infinité des croisements entre Amérindiens, Africains, Européens, Asiatiques. Je scrutais les visages de toutes les nuances de brun pour y lire je ne sais quel secret. J’aspirais à quitter mon cocon pour aller à la découverte de l’Autre.
New-York fut une éblouissante révélation. Dans les années 70, la ville connaissait un âge d’or. Au pied des tours jumelles de Wall Street, celles-là mêmes qui furent détruites par Al Quaeda, figurait l’orgueilleuse devise : « This is New York. Is there anywhere else ? » Artistes, écrivains, architectes, acteurs, musiciens, créateurs de mode, top models et vedettes du show-biz, les plus grands talents de la planète s’y trouvaient rassemblés.
Une autre culture?
Parmi eux, on voyait de plus en plus de Noirs. La croisade de Martin Luther King, assassiné quelques années auparavant, avait changé les mentalités. Black is beautiful résonnait comme un défi. Déterminés, agressifs, confiants dans leur génie, les Afro-Américains ne s’imposaient plus seulement dans le sport et dans la musique, mais aussi dans les lettres et les arts, la politique et la finance. Noirs et Blancs apprenaient à créer ensemble.
J’assistais, fascinée, à l’épanouissement d’une culture nouvelle.
Quand je regagnai la métropole française, New-York m’avait inoculé le virus de l’Ouverture. Je brûlais d’agir. Il y avait tant à découvrir, tant à comprendre. Je me penchai avec surprise sur l’île de mon enfance. L’étouffant microcosme avait laissé germer, en moins d’un demi-siècle, une étonnante floraison. Ecrivains, plasticiens, musiciens, sportifs martiniquais occupaient à présent le devant de la scène. Et tous étaient des Noirs. J’étais contente pour ma vieille Da.
Plus tard, l’écriture m’obligea à approfondir ma quête. Pas à pas, je pénétrais la culture créole. Cette culture qui plonge ses racines dans les cinq continents est la mienne, de naissance et d’essence. Plus je la connaissais et plus je l’aimais. J’aimais son génie et sa fantaisie, j’aimais sa générosité et sa joie.
En même temps, je découvris la force imbécile des préjugés. « Les idées fausses qui germent dans l’entendement humain y ont de si profondes racines que la vérité aura peine à s’y faire jour », observait Francis Bacon. Est-ce l’écœurement qui me poussa à militer pour le rayonnement créole ? L’indignation de voir la culture qui m’est chère si souvent ravalée à l’état de clichés économico-socio-géographiques, de « danseuses de la France », d’exotisme de pacotille ?
Une nouvelle spiritualité ?
La mise en œuvre du Festival Créole® m’ouvrit certains milieux. Je rencontrai des êtres extraordinaires, comme la Guadeloupéenne Maxette Olsson, débordante de chaleur humaine, égérie d’une firme suédoise fort connu, ou le Martiniquais Henri Guédon, musicien et plasticien, épris de culture yoruba.
Je rencontrai Ginette la Haïtienne, hantée par son île qu’elle ne cessait de recréer de ses pinceaux ; et Hector le Guyanais, ancien boxeur reconverti dans le show-biz, pelote d’audace et de ténacité ; Irénée le Sénégalais, poète et savant, qui faisait la plonge dans un restaurant d’Antibes pour financer ses travaux et se baignait à l’aube, l’hiver, dans la Méditerranée glacée. rénée, mon ami, vous me rappelez ces mots du films Invictus de Clint Eastwood : « Je suis le capitaine de mon âme« .
Femmes ou hommes, célèbres ou inconnus, il émanait d’eux tous une espèce de jubilation. Si j’essaye de l’expliquer, les mots pour la définir s’opposent, telles les touches d’un tableau impressionniste: générosité et dérision, insouciance et sagesse, fatalisme et ferveur.
J’éprouvais du respect. Des certitudes remontaient du fond de mon enfance inquiète et s’incrustaient peu à peu. Paisiblement. Certitude de l’infinie richesse des êtres, qu’ils soient Noirs ou Blancs. La poussée irrésistible de milliards d’individus suscitera, j’en suis sûre, d’autres Gandhi, d’autres Martin Luther King, d’autres Mandela, d’autres Obama… D’autres Aimé Césaire, d’autres Henri Guédon…
Certitude que ce n’est pas de législateurs dont nous avons besoin, mais de visionnaires, de philosophes, de saints. Une douloureuse confession de Barak Obama me traverse l’esprit : Parfois j’ai l’impression que tous ces efforts ne mènent à rien, que le changement est trop lent à venir, et j’affronte mes propres doutes. Mais laissez-moi vous dire, dans ces moments-là, la foi me redonne confiance.
Foi. « Ce siècle sera spirituel ou ne sera pas« , prédisait Malraux. Si justice fut le mot-clé du XIIIème siècle, foi est peut-être celui du XXIème.
L’ouverture à l’Autre demande beaucoup de foi. C’est une aventure individuelle, une aventure où chacun doit, patiemment, généreusement, réapprivoiser l’amour.
Marie-Reine de Jaham
Yomemoy
Réagir c’est ouvrir un échange.
Si la réaction est effacée elle ne sert à rien, ce qui peux être dommage au moins pour celui qui réagit et qui perd là l’occasion de s’enrichir de la pertinence du retrait.
Yomemoy
Le 13 nous avons participé à une journée autour d’un emblème de la Martinique la Yoles rondes de course.
Le commentaire que j’avais laissé jadis, disait un peu ce qu’on peut en tirer: Toucher plus loin que les cercles consensuels, qu’il est bien sur louable et profitable et rechercher et de valoriser.
Mon propos a dû être mal compris, puisqu’il a disparu.
Il reste que toutes expressions passées sous silence peut conduire à la mort de la rencontre de l’autre…(Bonjour l’ouverture)