Une identité commune
C’est à l’initiative de Roger de Jaham et de Gérard Dorwling-Carter que l’association « Tous Créoles » a été fondée en 2007 en réunissant une soixantaine de personnes issues de toutes les composantes de la communauté créole antillaise : Noirs, Mulâtres, Indiens, Chinois, Békés, Syro-libanais, mais aussi des Métropolitains et des Africains ayant adopté depuis longtemps notre créolité comme démarche de vie et de pensée.
Par la mise en œuvre d’actions et de gestes symboliques, notre association entend œuvrer afin de permettre à celles et ceux qui composent cette communauté d’apprendre à mieux se connaître et à se respecter, et ce dans leurs différentes singularités.
En finalité, l’objectif de l’association « Tous Créoles » est de permettre aux Martiniquais et aux autres communautés créoles, au-delà de l’histoire douloureuse de leurs origines, de se retrouver dans l’apaisement d’une personnalité partagée.
Enfin, « Tous Créoles » entend contribuer de façon vigilante et par tous les moyens à la défense des droits de l’Homme, à la lutte contre toute expression ou manifestation de racisme, de xénophobie ou de discrimination de tous ordres.
La fraternité assumée
En 2007, pour la première fois dans la courte histoire de nos sociétés post-esclavagistes, une association – c’est-à-dire un regroupement volontaire et organisé de femmes et d’hommes autour d’un projet idéologique commun – se constituait pour débattre à haute voix de sujets que l’on avait jusqu’ici soigneusement évité d’aborder depuis près de 160 ans ; en fait depuis que, dans notre pays, l’Esclave s’est libéré. Il s’agissait de débattre de ces frontières multiples, de ces relations complexes, de ces non-dits, de cette coexistence parfois rugueuse mais pourtant attachante, de cette affection amère, de cette chaleur teintée de ressentiment qui unit et désunit quotidiennement les Antillais, tant il est vrai que notre communauté créole est née dans l’inhumanité d’un crime qui la marquera pour longtemps.
Pour la première fois aussi, des hommes et des femmes de bonne volonté voulaient tenter, de façon ordonnée et non plus seulement instinctive ou intuitive, de délier des nœuds, de décoincer des esprits, de déplacer des lignes, de désoxyder nos mœurs et nos cœurs, enfin d’œuvrer pour la fraternisation des différentes composantes de la société créole.
Parmi ses membres fondateurs on peut noter la présence de personnalités telles que le chirurgien Henri Lodéon, l’écrivain Tony Delsham, les chefs d’entreprise Marcel Osenat, Bernard Hayot et Nicole Malidor, les universitaires Fred Célimène et Hector Élisabeth, l’avocat Gérard Dorwling-Carter, le révérend-père Louis Élie, l’historien Édouard de Lépine, le poète Marcel Rapon, etc.
Nous avons retenu « Tous Créoles » comme appellation, et non pas celle, par exemple, de « Tous Martiniquais », car nous n’imaginons pas pouvoir limiter la Créolité, qui se veut mouvement et élargissement perpétuels, à la seule Martinique !
Une pluralité respectée
De fait, la Créolité rompt avec une structuration identitaire figée : c’est un processus constant, à partir duquel se fondent toute son originalité et la force de sa modernité. Chercher à figer ou limiter notre personnalité créole serait une entreprise illusoire, tout autant que faire de notre pays un enclos, à l’heure où le monde devient un village trans et inter connecté. L’association compte aujourd’hui des femmes et des hommes ouverts, de bonne volonté, épris de paix et soucieux de contribuer à la construction d’un monde créole apaisé, débarrassé du poids de son passé, non pour l’oublier, mais pour ne plus le subir.