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Bienvenue au marché de l’Asile

Marché créole

Jean ABROSI a publié dans le quotidien France-Antilles Martinique du 27/02/2013 un fort sympathique article intitulé « Bienvenue au marché de l’Asile », qui décrit avec talent l’un des marchés créoles de Fort-de-France.
Une tranche de vie bien colorée de notre Créolité martiniquaise, que nous vous invitons à déguster ici.
 


Jean ABROSI : 75 ans, professeur de lettres histoire-géographie à la retraite. Président du Club la Perle créé en 1999 qui compte une cinquantaine de membres. Conciliateur de justice (Permanences à la mairie du Prêcheur).

Jean ABROSI

 
Bienvenue au marché de l’asile

Je prends plaisir à venir chaque vendredi au marché de l’Asile, au centre de Fort-de-France. Je me demande d’ailleurs pourquoi ce marché ne porte pas de nom à l’instar de celui de Floréal, dénommé « Marché Max Ransay ». Il est tout simplement appelé « Marché de l’Asile » à cause de sa proximité avec l’ancien asile Bethléem.
Peut-être s’appelle t-il « Marché Lafcadio Hearn » et que beaucoup l’ignorent.
Peut-être aussi que l’édilité de Fort-de-France n’a pas été à ce jour inspirée. Peut-être qu’il ne reste plus de figures emblématiques à Fort-de-France qui pourraient offrir leur nom. Peut-être que ce marché est du provisoire. Peut-être que, dans quelques années, on verra surgir, en ce lieu, un édifice nouveau. Dès 5h du matin commencent à affluer les clients qui découvrent sur les étals tous les produits vivriers et maraîchers en provenance de Rivière-Pilote, de Saint-Joseph, du Robert, du François, du Prêcheur et d’ailleurs. Les avocats, les concombres, les oranges, les pastèques, les bananes, les gombos, les paquets d’oignons, les feuilles de bois d‘Inde, les herbages, les tomates, les carottes, les épinards, les choux, les ignames, les ti-nains, les fruits-à-pain, etc.
Sous leurs parasols multicolores, les marchands s’affairent. Il règne dans ce marché une convivialité sympathique. Pas d’appellations, d’interpellations, de cris, de jurons, de gros mots. Les marchandes sont toutes souriantes. Elles accueillent le client avec gentillesse. Darling se distingue par ses phrases coquines qui plaisent beaucoup à ces makos qui s’agglutinent autour de son étal.
Chantal, épaulée par son fils, très achalandée avec des makandjas, jongle avec les prix.
Mais à côté de ces charmantes dames comme France-Lise, Bertinotte, Maryse et Paulette qui savent attirer le client, le sexe fort tient sa place dans ces lieux avec Didi, Jacky et surtout ce monsieur de Rivière-Pilote qui sait se faire entendre tant il a le verbe haut et ses blagues croustillantes.
Jusqu’à une certaine heure de la journée défilent des clients venant de tous horizons.
On devine la simple ménagère, la mamie qui désire manger sain, le restaurateur qui assure ses provisions du week-end.
Tout se déroule, réglé comme du papier à musique.
Je ne m’y trompe guère. Je m’attends à voir les mêmes visages qui me sont devenus familiers. Comme par exemple la fille du Loto d’en face aux charmes envoûtants qui attirent les regards masculins ou Jean sa bouteille vide à la main, d’un pas assuré se dirige vers le vendeur d’eau de coco. Comme tous les Martiniquais, il sait que cette eau est salutaire et prévient le risque du cancer de la prostate.
Ce marché de l’Asile est une véritable oasis de ruralité en plein centre foyalais. On y retrouve les bonnes manières de la campagne.
Le bonjour, le merci, le s’il vous plait sont de mises. On se parle, on se sourit, on se respecte.
On n’y voit guère rôder aux alentours ces jumpies qui pourtant pullulent dans certains coins de la Capitale. Ces bad boys qui font régner la terreur chez les mamies qu’ils agressent pour leur dérober leurs bijoux qu’elles ont payés de la sueur de leur front.
Je me demande parfois combien de temps durera encore ce marché. La relève est-elle assurée ? Qui des enfants de ces marchandes prendront le relais ? Qu’en pense Charles de Saint-Joseph ? Les jeunes d’aujourd’hui sont-ils prêts à faire demain comme leurs aînés d’hier. Les supermarchés ne vont-ils pas se Substituer totalement à ce type de marché comme celui de l’asile ? L’avenir nous le dira…
Jean ABROSI

1 Commentaire

  1. Marie-line Doppia

    Ah oui mon marché ! L’odeur des fruits, les couleurs entrelacées, le petit goûter… Vie bien colorée.
    Marie-line

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